Cigarettes électroniques: chronique d’une asphyxie annoncée
Pour éviter que votre investissement ne s’envole en fumée, réfléchissez bien avant de vous lancer dans l’ouverture d’une boutique de cigarettes électroniques. Quelques primo-investisseurs malheureux commencent à déchanter… Voici les raisons de cette asphyxie annoncée:
Une offre plus forte que la demande
On constate une multiplication des franchises et des installations de boutiques au point que certaines se concurrencent dans un rayon de 500 mètres. Regardez combien de boutiques se sont ouvertes dans votre quartier et combien il y a de points de vente de cigarettes traditionnelles. Comment tout ce petit monde va t-il pouvoir rentabiliser son investissement et payer loyer et salaires en se partageant un marché, certes encore en croissance mais encore marginal?
Des marges très serrées
Les cigarettes électroniques sont produites à un coût très bas par rapport à leur prix de revente mais qu’en est-il de la marge laissée au revendeur. La question pratique à se poser est combien de cigarettes ou de recharges de liquide dois-je vendre par jour en moyenne pour rembourser mon investissement, payer mes charges (essentiellement loyer et salaires) et faire du profit. Avant de vous lancer, faites ce petit exercice arithmétique…
Des franchiseurs sans scrupules
Les franchiseurs, premiers sur le marché et très astucieux ont vite compris le concept: « Vendons des pelles et des pioches à ceux qui veulent aller chercher de l’or. Ce sera plus rentable que de tamiser le lit du fleuve. » Et ils ont raison.
Preuves de leurs anticipations réduites sur le marché par exemple, les arguments massues du type « Une industrie en forte croissance », « Simple à gérer », ou « Un concept d’inspiration européenne » (si, si!). En revanche, l’absence de redevances ou des frais de publicité très réduits (1%) vous alertent sur 2 choses: ils ne s’attendent pas à ce que vous fassiez beaucoup de ventes sinon ils prélèveraient une part plus importante sous couvert de votre accompagnement et ils ne feront pas de gros efforts de marketing pour développer le marché.
Pour un franchiseur, muni d’un contrat de franchise-type acheté en ligne ou fait à la va-vite par un consultant du marché, c’est une opération qui marche tant que des gens ont l’illusion de prendre en mains leur vie en se lançant en affaires dans leur propre boutique. Quand le marché s’essoufflera, ils trouveront d’autres créneaux porteurs.
Attention, il existe de très bons franchiseurs sur le marché et nous ne voulons pas condamner le modèle de la franchise par ailleurs. Mais peut-être pas sur un créneau aussi volatile qu’un phénomène de mode.
Un marché atypique
Car en effet, le marché de la cigarette électronique ressemble bien à un phénomène de mode mais dont on a du mal à savoir s’il va vraiment s’implanter. Combien de personnes autour de vous fument ce genre de cigarettes? Combien de fumeurs sont-ils passés définitivement de la cigarette traditionnelle à la cigarette électronique? Savez-vous même quelle est leur consommation hebdomadaire?
En fait, il y a fort à parier que ce soit peu au regard de ce qu’un commerçant s’attendrait à vendre.
La particularité de ce marché est qu’il se développe rapidement grâce à l’attrait de la nouveauté et aux arguments de vente imparables (plus sain que la cigarette, moins interdit ou pas du tout dans les lieux publics, plus facile à implanter dans les soirées entre amis…) mais que le développement de marché se fait aussi en grande partie sur des arguments de sevrage tabagique et donc sur une population de gens qui souhaitent arrêter de fumer… Qu’arrivera t-il à nos revendeurs quand ces personnes auront effectivement réduit grandement leur consommation ou totalement arrêté de fumer? Le marché se contracte en même temps qu’il se développe.
Le risque d’un durcissement de la réglementation
Enfin, il y a un risque dans les prochaines années d’un durcissement de la réglementation et même de mesures préventives tant que l’innocuité de ces cigarettes que les fabricants vantent tant n’aura pas été prouvée sans aucun doute. Pour supprimer tout doute, il faut aux études scientifiques de nombreuses années de recul mais pas pour légiférer en attendant d’y voir plus clair. Par ailleurs, le flou actuel sur la qualité des produits vendus, leurs défauts d’étiquetage*, la possibilité de fabriquer ses propres liquides pourraient amener à des poursuites en cas d’accident. Un risque à bien mesurer…